Rhinoceros 3D. Ep 4/4. Et si on parlait d’avenir ?

Rhino8 Coque en TPU moussant

Il est désormais temps de conclure cette série en quatre épisodes sur Rhino 8, logiciel de CAO sur lequel Breizh Podo a largement appuyé sa transformation numérique. Le terme conclusion n’est d’ailleurs pas réellement adapté, car dans les lignes qui suivent, il est largement question de projets et du futur.

Dans nos trois premiers articles, nous avons parcouru les trois dernières années pendant lesquelles nous avons intégré de nombreuses évolutions technologiques liées à l’intégration d’outils numériques dans notre production. À partir de 2021, nous avons beaucoup réfléchi, beaucoup essayé et testé pour construire un process dont nous avons listé tous les avantages dans l’article précédent (Rhinoceros 3D. Ep 3/4. Tout a commencé et tout se finalise par l’orthèse). Il faut désormais poursuivre le chemin, aller plus loin et continuer à mobiliser un temps de recherche et de réflexion dans notre quotidien.

Une nécessité de se moderniser

Notre objectif n’a jamais été de vouloir nous distinguer. Chez Breizh Podo, nous avons une approche rationnelle et pragmatique des choses. Si nous avons investi autant de temps et de moyens dans l’intégration de solutions numériques dans notre process de fabrication, c’est parce que nous avions la certitude que notre métier, la podo-orthésie, devait se renouveler. Selon nous, la podo-orthésie devait s’inscrire dans l’air du temps et elle devait intégrer des solutions modernes. Pour des raisons économiques, il nous fallait aussi trouver une façon de produire mieux, de façon plus maitrisée et efficace. C’est pour cela que nous avons cherché des solutions. En trois ans, nous avons vécu une véritable révolution, qui a permis à tous nos équipiers d’acquérir de nouvelles compétences, de progresser et de trouver leur place dans une entreprise qui s’est transformée. Selon le philosophe grec Aristote (384-322 av. J.-C.), « Le progrès ne vaut que s’il est partagé par tous ». Chez Breizh Podo, tout le monde a embarqué dans l’aventure et personne ne reviendrait en arrière. C’est l’une de nos grandes satisfactions.

Une communauté à mettre en place

Nous avions aussi conscience qu’il y avait des enjeux externes à notre cheminement. En effet, pour notre podo-orthésiste Luc Sieurin : « l’un des objectifs était de générer des réactions, de créer de l’échange. » Cet objectif est en partie atteint. Plusieurs confrères nous ont contactés et nous avons des échanges réguliers avec certains. « Je me rends compte que finalement, peu de monde est dans l’action, beaucoup de professionnels sont dans la réflexion. Beaucoup de gens cherchent ou attendent des solutions, cherchent des infos, ont des demandes, mais ils n’ont pas encore fait le pas décisif. Ceux qui hésitent, je l’explique par la peur des transformations de l’équipe et du process. Il faut savoir que ça n’enlève pas l’emploi, ça crée même de l’emploi qualifié, ça mobilise tout le monde dans l’entreprise et la qualité des produits augmente. » « J’ai croisé un de mes formateurs d’il y a 20 ans et il m’a dit qu’il était surpris de ce qu’on a développé. Il m’a dit qu’en Suisse, ils n’en sont pas là, ce qui m’a étonné. Je pense vraiment qu’il y a un intérêt à échanger et à avancer ensemble. »

Rhinoceros 8

Un chemin propre à chacun

L’intérêt de notre communauté pour la transformation qui s’est engagée chez Breizh Podo se manifeste souvent par de l’étonnement, puis par une envie de venir nous voir. « Pourtant, il n’y a pas de recette, pas d’outil à dupliquer et à intégrer, c’est le professionnel lui-même qui doit évoluer, s’engager dans une réflexion. C’est un parcours, un cheminement fait d’expérimentations, de plantages, de l’intégration de nouvelles façons de faire dans des habitudes de travail. Ce n’est pas possible de venir me voir et de repartir avec la solution. Cette solution, elle existe, mais elle doit être portée et créée par un professionnel qui doit s’investir. »

« Il est possible de se faciliter les choses en adoptant des logiciels commerciaux, reprend Luc Sieurin, mais ils sont souvent très complexes, couteux et ils sont figés. S’ils évoluent, vous devez suivre leurs évolutions, qui ne correspondent pas forcément aux vôtres. Avec Rhino, on va où on veut et comme on veut. À ce jour, je ne lui vois pas de limite. Avec Rhino, chacun est aux commandes. Il faut l’aborder avec cette volonté de choisir sa propre direction », explique Luc Sieurin.

Quelle est la suite de l’histoire chez Breizh Podo ?

Notre certitude, c’est qu’il faut exercer une veille technologique et qu’il faut continuer à être curieux. « Je m’intéresse à des logiciels comme Blender, un gratuit. Il s’appuie sur une grosse communauté collaborative qui produit plein d’idées et de solutions, qui propose une autre approche. Blender est plus volumétrique, alors que Rhino est plus paramétrique. Je travaille aussi sur des solutions de codage en Python et je m’appuie sur l’IA pour m’aider. »

L’approche de Luc Sieurin est celle d’un professionnel qui cherche des réponses techniques à chacun de ses besoins et qui construit son modèle brique par brique : « Si on veut fabriquer un pull bleu, il faut un modèle de pull, puis la matière, la coloration, une machine à tricoter, une machine à coudre, etc. En clair, il y a de multiples taches à réaliser et toutes peuvent être améliorées au fil du temps. Lorsqu’une étape a été affinée, à un moment, cela permet aussi d’ouvrir des chemins parallèles, de prendre une autre direction. »

Quelle direction va prendre Breizh Podo ?

Luc Sieurin s’intéresse à chaque étape d’un process, mais à ce jour, comme nous l’avons vu en détail dans les trois articles précédents, il a développé plusieurs fonctionnalités pour produire plusieurs parties différentes d’une chaussure et de sa fabrication : formes, relevé de forme et orthèse. « Aujourd’hui, je voudrais tout assembler dans Rhino », annonce sans surprise notre podo-orthésiste.

Actuellement, l’un des produits les plus complets que Luc Sieurin peut produire « numériquement », c’est la coque enfant. Elle est composée d’une semelle à base montante qui permet d’avoir un meilleur maintien de la cheville et du pied. « Avant, la coque était fabriquée en mousse. Désormais, grâce au scan du pied, au code et à un matériau sorti il y a quelques années (*), on peut jouer sur les densités dans la semelle, renforcer les épaisseurs où on le souhaite. Ce matériau, on peut le travailler, le poncer. Comme cela a été le cas pour les formes, j’améliore encore la qualité à chaque coque produite. Cela prend du temps, car j’ai moins de coques que de formes à produire, il va falloir être patient pour améliorer et stabiliser les choses. »

Luc cherche aussi à automatiser les découpes. Il voudrait par ailleurs se pencher sur la production de chaussures intégralement produite en 3D : « Plutôt des chaussures d’intérieur, type Croc, qui pourront être faites sur mesure. »

Ne pas négliger l’impact de la numérisation sur l’entreprise

À ce jour, Luc Sieurin se félicite des évolutions qu’on induit l’adoption de process numériques dans son entreprise, mais il reste prudent : « Je me dois de me poser systématiquement la question de la façon dont chaque évolution va s’intégrer dans la structure de mon entreprise, de comment je trouve un modèle économique ? Le palier technique que nous avons passé et dont nous avons partagé le récit dans les trois premiers articles de la série sur Rhino a été stabilisé en un an. Chaque nouveau palier demandera du temps pour son développement comme pour être stabilisé. Il faut tenir compte de tout cela et ne surtout pas ignorer que chaque palier doit être digéré par l’entreprise, autant en termes d’organisation que par les équipiers. »

Enfin, Luc Sieurin évoque l’intérêt ou le risque commercial qu’il pourrait y avoir à partager des informations : « Selon moi, il faut le faire, parce qu’on valorise à la fois le métier et notre entreprise. »

Autant dire que cette série d’articles sur le thème de l’usage de Rhino et des solutions numériques est amenée à connaître des suites, que nous ne manquerons pas de vous raconter !

 

(*) Le TPU moussant ou TPU foamy ou TPU flexible, constitué de polyuréthane thermoplastique.

Épisodes précédents :

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